Néon VS baguette

Emilie avait été profondément estomaquée par ce que Alina lui avait racontée quand elle lui avait parlé de cette mission, si on pouvait appeler cela ainsi. Si Maître Yoda avait cautionné que les deux femmes se fondent dans la Contrée Obscure et effleurent le Côté Obscur pour obtenir des informations, Emilie était presque certaine que ce qu’elles allaient faire n’était pas au programme. Par ailleurs, si Alina était du genre sentinelle, elle, Emilie, n’était rien de tel et l’idée de tuer sans être agressée préalablement lui déplaisait. Mais il lui déplaisait encore plus d’être mise à l’écart des activités d’Alina.

Aussi était-elle pleinement satisfaite du rôle qui serait le sien. Surveiller, guetter, neutraliser sans tuer, voilà qui était parfait. Fuir ? Elle ferait ce qu’elle pourrait pour ne pas avoir à le faire. Elle garderait la tête haute jusqu’au bout. Néanmoins, elle n’était pas rassurée concernant Alina, presque effrayée que ses comportements finissent par la faire pencher du mauvais côté de la balance. Néanmoins, elle l’écouta faire le point sans préjugés. Son Maître savait probablement très bien ce qu’elle faisait.

« Je suivrai vos directives, Maître. Mais… si jamais je devais repartir seule, y a-t-il un endroit où… vous souhaiteriez que nous nous retrouvions. »

Elle avait décidé de conserver le côté optimiste de la procédure en comptant dur le retour d’Alina, même au cas où elle viendrait à devoir l’abandonner. C’était bien plus sûr.

Bon, dans le cas où elle devrait fuir, elle fuirait. Et Alina se chargerait de la retrouver. La bonne nouvelle, c’était qu’elle n’aurait pas à se soucier de ça, la mauvaise, c’est qu’elle risquait de se sentir dans un état d’insécurité certain si elle se retrouvait isolée trop longtemps dans la Contrée Obscure. Diable, elle n’avait que onze ans. Toutefois, elle savait pertinemment qu’Alina ferait ce qu’il faudrait pour ne pas qu’elle se retrouve en trop grand danger, c’était déjà ça.

« Très bien, Maître. »

Qu’elle essaie de la réconforter et de la rassurer ne déplaisait pas à l’enfant. Elle avait vraiment le sentiment que sa vie de Padawan était sur sa fin. En tout cas, dans le cadre des responsabilités que son Maître avait décidé de lui confier. Mais Emilie n’avait jamais été du genre à renoncer face à un obstacle et elle n’allait pas commencer aujourd’hui. Depuis l’enfance, elle s’était entraînée en tout lieu et en tout temps un masque, une façade. Il n’était pas temps de changer cela.

« Je suis prête. »

La façon dont Alina asphyxia le garde avec ses simples jambes impressionna la padawan, même si ce n’était pas la première fois que son Maître se montrait capable de déplacer des montagnes. Mais cela impressionnait toujours la fillette qui se savait tout à fait incapable d’en faire autant. Bon, elle savait aussi qu’Alina ne le lui demanderait pas. A onze ans, ce genre d’acrobaties n’était pas une partie de plaisir. En un instant, Emilie sut qu’Alina savait tout ce qu’elle voulait savoir. Il était maintenant temps d’agir.

Dès qu’Alina eut pénétré dans la maison, Emilie se plaça à proximité, aux aguets. Elle ne tenait pas particulièrement à ce que des personnes soient assassinées, mais quand il s’agissait de son Maître, elle était prête à tout pour qu’elle ne soit pas inquiétée. Elle espéra toutefois qu’il n’y aurait pas de problèmes. Il s’avéra que son vœu ne fut pas exaucé. Un homme à l’allure peu avenante s’avançait dans sa direction. Il tenta de la contourner pour approcher la maison mais elle s’interposa.

« Laisse-moi passer, gamine ! »
« Je suis navrée, mais j’ai reçu comme consigne de ne laisser passer personne. Mon Maître s’entretient actuellement avec ces personnes et cet entretien se doit de rester privé. »

L’homme éclata d’un rire gras et mauvais qui ne plut pas à Emilie. Mais elle ne daigna pas bouger pour autant.

« Parce que tu crois que tu peux me dicter ce que j’ai à faire, sale petite prétentieuse, » se gaussa-t-il en l’attrapant soudainement et en la maintenant. « Tu ne fais pas le poids, avorton ! »

Emilie sentit un mouvement de panique l’envahir, auquel elle tenta de ne pas se laisser aller. Elle était une Jedi et elle n’allait pas se laisser en compter par un abruti de première catégorie, même s’il était plutôt fort et que, pour le moment, elle se sentait plutôt en position de faiblesse.

« Alors, Glad, tu t’en prends à des fillettes, maintenant ? » retentit une voix moqueuse, un peu plus loin.
« Mêle-toi de tes affaires, Kentburry ! J’ai un compte à régler avec eux. Et cette petite sotte croit qu’elle peut m’empêcher d’entrer. Mon Maître s’entretient avec ces personnes, » glapit-il sur une voix ridiculement haut perché. « Comme si elle ou son Maître avait la possibilité de faire quoi que ce soit. »

Emilie eut un sursaut de surprise. Kentburry, c’était comme cela que le fameux Glad avait appelé le nouveau venu ? Le même nom que Matthieu de Kentburry, l’ami sorcier de la princesse Kathleen. Léa avait déjà eu l’occasion de lui parler de ce type. Mais qu’est-ce qu’un noble du Royaume d’Ariel faisait dans un village de sorciers maléfiques ? Bon, une chose à la fois, se dit-elle. Elle n’allait pas se faire secourir par un jeune homme comme une princesse en détresse. C’était bon pour Kathleen, ça !

Allez, et une petite poussée de Force, une !

En un instant et sans comprendre ce qui lui arrivait, le dénommé Glad se retrouva dans les choux plusieurs mètres plus loin, brutalement assommé par le sol, qu’Emilie lui avait fait rencontrer sans beaucoup de douceur. Mais on ne s’attaquait pas à un Jedi, même un Padawan sans en subir les conséquences.

Estime-toi heureux que je n’aie pas sorti mon sabre, coco !

Et voilà qu’elle se mettait à parler comme Alina. A croire que le Jedi avait véritablement bien plus d’influence sur elle que Matt et Léa ne pouvaient le soupçonner. Secouant la tête, elle se tourna vers le nouveau venu et le toisa, se mordant les lèvres avec circonspection.

« Etes-vous Matthieu de Kentburry ? »

L’homme haussa un sourcil, visiblement surpris et intrigué par la question de la fillette. Emilie ne dit rien, attendant simplement que l’individu réponde à sa question. Elle n’était qu’une petite fille, si elle ne se montrait ferme et assurée dans son comportement, l’attitude de ce Glad ne demeurerait pas un cas isolé. Et ami de Kathleen ou pas, elle ne pouvait être sûre des intentions de l’homme. Celui-ci finit par répondre, mais par un questionnement.

« D’où tu connais mon frère, gamine ? »

Son frère ? Emilie tiqua avant de comprendre. Kathleen étant une sorcière, Matthieu et elle avait dû se rencontrer à Poudlard. Et si elle en croyait son intuition et ce qu’elle pouvait déduire de la présence de cet homme en ces lieux, ce Kentburry n’était pas né dans le Royaume d’Ariel et d’Eric mais bel et bien ici, au village Mim. Et sa famille n’était probablement pas des plus recommandables. Il allait falloir se méfier des informations qu’elle lui distillerait.

« Je ne le connais pas. J’ai entendu parler de lui, c’est tout. Je sais notamment qu’il a quitté le village et vit désormais dans un lointain royaume. J’ignorais qu’il avait encore de la famille ici. »

Un bon moyen pour prendre quelques informations sans trop en dire. Glad gémit dans son inconscience et Emilie et son interlocuteur lui jetèrent un regard, la jeune fille, chargé de mépris, le jeune homme, moqueur. Kentburry reprit alors la parole.

« Je vis effectivement au village, ainsi que nos parents, » reconnut-il. « Mais tout cela ne semblait pas assez bien pour mon frère, qui a ensuite corrompu ma sœur. Enfin, que veux-tu, on ne choisit pas sa famille. Mais permets-moi de me présenter officiellement. Peter de Kentburry. Enchanté. »

Il lui tendit sa main mais Emilie ne la prit pas. Elle en avait bien assez dit comme ça et elle n’était pas venue ici pour bavarder. D’ailleurs, son Maître n’allait certainement pas tarder à terminer son œuvre. Et il valait mieux qu’il n’y ait pas de témoin quand elle sortirait.

« Je ne tiens pas spécialement à faire connaissance, ne m’en veux pas, mais je suis ici pour une mission et pas pour faire la causette. D’ailleurs, je serais toi, je ne resterais pas dans le coin. Mon Maître est bien moins sympa que moi en ce qui concerne ceux qui ont vu son visage. Je te suggère de déguerpir tant que tu le peux. »

Peter de Kentburry ne semblait pas très enchanté de la fraîcheur du ton de la jeune padawan. Il posa les yeux sur son sabre et cela, combiné à la façon dont elle avait réglé son compte à Glad, Emilie comprit qu’il avait deviné qu’elle faisait probablement partie de ces individus qui maniaient une énergie du nom de « Force ». Les Jedis. Et que, de toute évidence, chez les Jedis, il fallait craindre même les enfants. Fronçant les sourcils devant cette gamine qui se prenait pour une grande, il décida de tenter une approche.

« Tu es une Jedi… »

Observateur, le Peter. Mais ça n’allait pas lui apporter grand-chose. Suivant la même logique que son Maître, à savoir attiser la rivalité entre Siths et sorciers, Emilie décida de la jouer fine en répondant malgré tout à l’homme. Faisant une moue presque de dégoût en entendant les propos de l’homme, elle parla d’une voix pleine de mépris et de suffisance, digne de ceux qu’elle avait rejoints pour sa mission.

« Une Sith, je vous prie. Les Jedis sont faibles et ne connaissent pas le véritable pouvoir ! »

Le regard fronceur de Peter lui donna à penser qu’il ne connaissait pas la différence entre les Jedis et les Siths, mais ça n’avait pas d’importance. La nuance était positionnée et d’autres sauraient ce qu’elle voulait dire. Sentant la présence de son Maître se rapprocher d’elle, Emilie se tourna vers Peter.

« Mon Maître revient ! Dégage ! Dépêche ! Si tu ne veux pas mourir ! »

Peter sembla comprendre enfin le danger qu’il courait. Il se décida finalement à fuir au grand soulagement d’Emilie. Celle-ci garda l’œil sur les alentours, attendant le signal effectif de son Maître pour bouger.

Alina avait surpris Peter en train de s’enfuir mais elle se contenta d’un commentaire ironique et Emilie sourit alors que le regard de son Maître se posait sur l’homme qui était étendu sur le sol. Son Maître savait exactement comment elle s’y était prise, mais cela n’étonna pas Emilie. Cela faisait bien longtemps qu’elle ne pouvait plus rien lui cacher relativement à son entraînement, à ses choix de combat et ce genre de choses. Par exemple, Alina avait très bien su tout de suite comment elle allait gérer Léa et Jenifaël. Et elle ne s’y était pas opposée, donc c’était que Emilie ne s’en était pas si mal sortie. Toutefois, Alina blessa l’homme de sa lame, elle semblait donc bien vouloir signer ses actes.

« Je vois. J’ai dis à ce type que j’étais Sith. Je pense que des rumeurs devraient naître par ici. »

Alina annonça alors le départ et Emilie suivit son Maître jusqu’au vaisseau. Tout s’était déroulé sans accroc et sans anicroche. Il n’y avait donc pas de souci à se faire. Maintenant, les choses allaient se corser. Tout allait se passer au sein de la hiérarchie Sith. Emilie songea à son idée et se résolut à en parler à son Maître dès que les choses en seraient à un niveau idéal. Il ne fallait pas perdre une chance d’infiltrer les hautes sphères des Siths.